mercredi 17 février 2010

La malle

«L’appel ne se fait pas de façon innocente. Et c’est à se demander s’il s’agit vraiment d’un appel; lorsqu'on y réfléchit avec une certaine distance, ça ressemble davantage à l’assemblage d’un nombre précis de morceaux qui s’emboîtent à la suite d’un événement tout aussi précis. La clarté se fait. Certains appelleront ça la foi. Difficile de dire si je suis d’accord avec cette affirmation. Difficile de dire si je suis d’accord avec tous ces spécialistes qui observent ça de loin, dans leurs bureaux, dans leurs études, empêtrés dans leurs interprétations et leurs fables.

Je n’ai jamais pu en discuter : je n’ai jamais rencontré personne qui soit atteint du même syndrome. En fait, je ne discute plus. Lorsque j’ai senti tout ça se mettre en place en moi, lorsque j’ai su par le biais d’une révélation qui n’avait rien de divine que la transformation que je craignais allait enfin s’opérer, je me suis enfui. Je me suis éclipsé. Je n’avais nul envie qu'on m'expose sur les pages de quelque mauvais journal…»

-… et la lettre continue comme ça durant deux bonnes pages, conclua l'un.
L'autre resta muet. Ils poursuivirent leur fouille.

Tout l’intérêt que les enquêteurs avaient porté à la lettre s’évapora lorsqu’ils remarquèrent la malle collée contre un mur, au fond du sous sol, près de la chute à charbon. Lorsqu’ils réussirent à l’ouvrir, l’un d’eux avala une seconde fois son déjeuner. L’autre resta béat, ne comprenant pas tout de suite ce dont il s’agissait.

De petits crânes, tout petits, trop petits. Des crânes de nourrissons. Pas encore nés.